Ce n’est pas le tout d’élaborer un budget aux petits oignons pour votre DSI, encore faut-il le vendre à votre direction pour qu’elle le valide. En tant que PDG de Dynamips, j’en sais quelque chose. Si la première étape est bien intégrée et suffisamment documentée sur le web, les DSI se retrouvent souvent bien seuls lorsqu’il s’agit de vendre ce budget en interne. Voici donc quelques modestes conseils pour vous aider à présenter ce budget d’une manière (plus) convaincante. 

Établir un budget est un exercice certes complexe mais globalement bien maîtrisé par les DSI. En revanche, justifier ce budget pour le faire accepter par sa direction, c’est une autre paire de manches. Après plusieurs heures (parfois jours) à élaborer un budget précis et pertinent, celui-ci est au pire intégralement retoqué, au mieux remanié pour être diminué. 

Bon nombre des DSI avec lesquelles nous travaillons nous ont fait part des difficultés rencontrées lors de cette étape cruciale qu’est la validation du budget. Le problème provient généralement du décalage de perception entre la DSI et la direction. L’un y voit de la valeur ajoutée, l’autre y voit des postes de dépenses (on vous laisse deviner qui est qui). Ce décalage n’a absolument rien d’insurmontable mais si vous redoutez cette étape et que vous la préparez mal, cela peut rapidement dégénérer.

Voici donc quelques conseils inspirés de la méthode “Customer Centric Selling” et de mon expérience de PDG, pour vous aider à mieux “vendre” ce budget à votre direction.    

1/ Posez le contexte

Commencez par identifier l’impact des décisions prises l’année passée et les résultats concrets des investissements réalisés par la DSI. N’hésitez pas à souligner les impacts négatifs également, comme (au hasard) un manque de moyens financiers sur l’année passée qui ne vous a pas permis d’atteindre les objectifs que vous vous étiez fixés.

2/ Recueillez les « pain points » de vos utilisateurs…

Un travers que nous rencontrons fréquemment chez nos clients, c’est celui de vouloir recenser les besoins des utilisateurs. Or, nous sommes rarement en mesure d’exprimer clairement et précisément nos besoins lorsqu’on nous les demande. Comme l’expliquait Pierre Bourdieu à propos des sondages

“Une des propriétés des sondages consiste à poser aux gens des problèmes qu’ils ne se posent pas, à faire glisser des réponses à des problèmes qu’ils n’ont pas posés, donc à imposer des réponses.”

L’exercice du recueil des besoins induit ces mêmes biais cognitifs chez les utilisateurs. Résultat : soit ils ne savent pas quoi répondre, soit ils donnent des réponses attendues. 

C’est pourquoi nous préconisons plutôt de recueillir leurs “pain points”, c’est-à-dire les tracas quotidiens de vos utilisateurs vis-à-vis du système d’information, avec leur propre point de vue : qu’est-ce qui les agace ? Qu’est-ce qui les ralentit ? Qu’est-ce qui les empêche de dormir ?    

3/ …Pour identifier leurs besoins

Charge à vous ensuite d’exprimer ces “pain points” en “besoins utilisateurs”. Lorsque vous avez établi votre budget, vous avez probablement fait cet exercice pour savoir où investir l’année suivante. L’objectif de cet exercice consiste à prouver à votre direction que les investissements sont motivés par des décisions rationnelles. Et en parlant de rationnel :

4/ Récoltez des données chiffrées 

On peut contester des ressentis, pas des faits (ou plus difficilement en tous cas). En plus de légitimer vos choix, les données chiffrées permettent d’appuyer encore plus fort sur les “pain points” de vos utilisateurs et de concrétiser l’impact de ces désagréments sur l’entreprise. Par exemple:

Pain point : Les utilisateurs trouvent que le VPN est trop compliqué et contraignant pour le télétravail, ils ne l’utilisent pas.

Données chiffrées

Besoin : Accéder au système d’informations de l’entreprise depuis l’extérieur avec le moins de contraintes possibles, sans compromis sur la sécurité.

5/ Posez un problématiques claire

Une fois que les différents “pain points” et réponses techniques associées sont identifiés, essayez de les résumer en une problématique claire pour votre entreprise. Cela facilitera la lisibilité de vos choix et fera le lien entre tous vos postes de dépenses. Cette problématique peut être exprimée sous la forme d’une simple question. En reprenant l’exemple cité plus haut : 

“Comment garantir un niveau de productivité égal en dehors des murs de l’entreprise ?”

Ou

“Comment limiter les compromissions du système d’informations, sans contraindre les usages ?”

6/ Exposez les réponses techniques

Une fois ces éléments de contexte exposés, présentez les réponses techniques retenues. Il ne s’agit ni plus ni moins que de présenter les différents investissements que vous souhaitez réaliser l’année prochaine. Mais pour chacun d’eux faites le lien avec : 

Présentez les bénéfices associés pour chaque investissement, les bénéfices pour l’entreprise mais aussi pour les collaborateurs. Un bénéfice s’exprime par la diminution, l’augmentation, la suppression ou l’amélioration de quelque chose dans l’entreprise et le quotidien des collaborateurs. 

7/ Parlez usages

Cette étape n’est pas forcément nécessaire mais si vous souhaitez enfoncer le clou, décrivez ce que chaque réponse technique prévue changera dans le quotidien des utilisateurs ou de l’entreprise. Pour ce faire, décrivez les situations problématiques induites par les pain points de vos utilisateurs et décrivez ensuite comment cette situation s’améliorerait avec l’investissement réalisé. 

8/ Partagez votre “roadmap” des investissements

Il s’agit ici de jouer la transparence en réalisant un rétro-planning de vos investissements basé sur l’urgence de chaque dépense à réaliser, elle-même déterminée par la criticité des besoins utilisateurs. 

9/ Jouez franc-jeu

Vous n’êtes pas dupes, votre direction non plus. Malgré toute la bonne volonté du monde et la précision chirurgicale avec laquelle vous aurez établi votre budget et votre rétro-planning, les aléas d’une vie d’entreprise vous forceront à faire des ajustements en cours de route. C’est ce qui s’est passé avec le confinement en mars dernier par exemple. Expliquez qu’il s’agit d’un scénario idéal mais que rien n’est gravé dans le marbre pour autant.    

10/ Laissez un petit souvenir

Comme vous pouvez le constater, cela fait un paquet d’informations ! N’hésitez pas à laisser un document récapitulant tout ce que vous venez de partager avec votre direction. Si vous avez utilisé un support type Powerpoint, cela fera amplement l’affaire. 

Nous avons d’ailleurs créé pour vous un template permettant de structurer votre discours et de vous guider dans les différents éléments à lister auprès de votre direction. Si vous ne savez pas par quel bout commencer, n’hésitez pas à la télécharger !